
Accepter l’incertain ?
L’épidémie de coronavirus nous contraint à éprouver l’incertain de nos existences comme une dégradation provisoire. Ne faut-il pas plutôt, sur un mode pascalien, y voir notre condition même ? C’est ce que tâcherait de concevoir une pensée véritablement complexe, inspirée d’Edgar Morin, qui aurait conscience des liens unissant chaque chose.
En ces temps où un virus soumet nos existences, déjoue nos projets, crée partout un climat d’incertitude, le hasard a voulu que je trouve quelque lumière dans les pages de Pascal sur la « disproportion de l’homme » (Pensées, Brunschvicg, 72), ce texte que chacun a lu une fois dans sa jeunesse, jamais médité depuis : « Voilà où nous mènent les connaissances naturelles. Si celles-là ne sont véritables, il n’y a point de vérité dans l’homme et si elles le sont, l’homme trouve un grand sujet d’humiliation, forcé à s’abaisser d’une manière ou d’une autre. Et puisqu’il ne peut subsister sans les croire, je souhaite qu’avant que d’entrer dans de plus grandes recherches de la nature, qu’il la considère une fois sérieusement et à loisir, qu’il se regarde aussi soi-même… » Un peu plus loin encore : « Car enfin qu’est-ce que l’homme dans la nature ? Un néant à l’égard de l’infini, un tout à l’égard du néant, un milieu entre rien et tout, infiniment éloigné de comprendre les extrêmes… »
Notre Pascal est celui de l’homme situé entre deux infinis, mélange de folie et de sagesse. Je n’ose aller jusqu’à voir Pascal en précurseur de l’écologie. Il est frappant, cependant, de constater dans ces pages comme le mot « nature » est le leitmotiv, et que le mot « milieu », qu’on préfère aujourd’hui à celui d’environnement, est celui qui convient à l’homme : « Nous voguons sur un milieu vaste, toujours incertains e