
La France dans le noir. C’est maintenant ! de Hervé Machenaud
La « concurrence » déchaînée dans l’espace européen et la priorité déraisonnable donnée aux énergies renouvelables ont non seulement fait le lit d’une corruption inédite, mais aussi renforcé une crise énergétique européenne d’une rare ampleur, que l’essai vigoureux d’Hervé Machenaud aide à comprendre.
Réédition d’un livre paru en 2017, La France dans le noir du polytechnicien Hervé Machenaud vient à point nommé pour éclairer le lecteur à propos des enjeux énergétiques dans l’Hexagone au xxie siècle. Depuis quarante ans, l’auteur estime que la finance a pris le pas sur l’industrie, l’idéologie sur l’ingénierie, la dérégulation européenne sur la planification nationale. Fleuron de l’industrie française de pointe, Électricité de France (EDF) en a été la première victime, au détriment de l’intérêt et des consommateurs français et pour le plus grand bénéfice de « fournisseurs alternatifs », légitimés par l’ambivalente « transition énergétique » impulsée par l’Allemagne depuis son choix antinucléaire de 2011.
Au nom de la « concurrence » prônée par la Commission européenne, EDF, monopole national, a été littéralement dépecée, avec le consentement, voire la collaboration de gouvernements successifs. Partisan du nucléaire, l’auteur rappelle que la France a construit le parc de production d’électricité le plus économique et le plus efficace d’Europe, insensible aux variations du prix des matières premières et n’émettant aucun gaz à effet de serre. Dans un effort colossal pour cette époque lointaine, elle a créé un outil industriel pour en assurer le succès et la pérennité au service de tous les Français. La lutte acharnée de Berlin contre le nucléaire français pour des raisons idéologiques et stratégiques a concouru à la destruction de cet outil industriel, qui faisait la fierté nationale dans le monde entier.
Le développement incontrôlé d’énergies éoliennes et solaires massivement subventionné par des fonds publics, qui fournit pourtant fort peu d’électricité en comparaison avec le nucléaire ou l’hydraulique, la fermeture de centrales nucléaires en France (Fessenheim en est l’exemple caricatural) et le déclenchement de la guerre russo-ukrainienne ont contribué à la fragilisation de la France sur le plan énergétique et à la politique de rationnement qui s’y dessine. La « concurrence » déchaînée dans l’espace européen et la priorité déraisonnable donnée aux énergies renouvelables ont non seulement fait le lit d’une corruption inédite, mais aussi renforcé une crise énergétique européenne d’une rare ampleur, que l’essai vigoureux d’Hervé Machenaud aide à comprendre.