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Flux d'actualités

Hommage à Michel Deguy

par

Esprit

Michel Deguy, poète et philosophe, fondateur en 1977 de la revue Po&sie, est mort le 16 février 2022. Une de ses formules devenue célèbre, « la poésie n’est pas seule » permet, sans l’y résumer, de saisir une démarche qui inlassablement affirma l’importance du langage dans la cité : celui de la poésie dialoguant avec celui de la philosophie et de la réflexion éthique et politique, dans une attention sensible à tous les aspects de la réalité, et au langage des autres. Auteur de deux textes pour Esprit dans les années 1960, l’un sur l’attitude politique et intellectuelle à opposer au marxisme, l’autre sur le « tout-risque » dans un dossier consacré à ce thème, Michel Deguy resta présent dans les pages de la revue à travers les recensions de ses livres.


   

« Lettre à un officier du cinquième bureau »

Michel Deguy · Juillet-Août 1960

Dans cet article de l’été 1960, Michel Deguy s’adresse aux militaires, auxquels il reproche de tomber dans le piège que leur tend le marxisme : se situer du côté de ces adversaires que le marxisme, en tant qu’idéologie accordée à la phase historique en cours, a précisément disqualifiés. Alors que l’Ouest ne fait que sécréter des faits pour lesquels l’idéologie marxiste vaut immédiatement comme explication, Deguy estime qu’il est de la responsabilité du politique de produire des faits-nouveaux, qui « objectivement », disqualifieraient les raisonnements marxistes.


   

« Notes sur le risque-tout »

Michel Deguy · Janvier 1965

Dans le dossier de janvier 1965 consacré au risque, Michel Deguy s’interroge sur ce qu’est ce « tout », que l’on risque « pour le tout », selon l’expression consacrée. Dépliant cette interrogation, Deguy identifie le risque à l’impossible irruption dans la réalité, l’élan héroïque qui donne une chance d’y prendre pied, sans assurance définitive. De sorte que le croire est ce courage qui permet de traverser le vide et le retraverser, viatique de la science, comme de la poésie, comme de la foi.


   

Michel Deguy, Bief, Gallimard, 1964.

Christian Audejean · Mai-Juin 1964

Michel Deguy ne se laisse pas emporter par les eaux du fleuve des mots ; doucement, il les assagit et les capte dans ses biefs, qui les conduisent et les dirigent, sans heurt, vers les moulins de la poésie. Chaque poème est le lieu d’un lent passage du temps qui frémit imperceptiblement dans chaque corps, chaque objet, situé au cœur de la prose du texte, à la place exacte où il subira son emprise, son étreinte et son érosion.


   

Michel Deguy, Ouï-dire, poèmes. Gallimard, 1966.

Yves Bertherat · Décembre 1966

Le poème écrit Michel Deguy, fait apparaître « notre époque, la phase où nous en sommes ». Il ajoute « car la chose pour les hommes apparaît longtemps après le nom entendu ». Reconquérir un certain mode d’exister au milieu de ces choses que notre fabrication a transformées, les rapports de cette reconquête avec l’exercice de la langue, le propre et la différence de la science et de la poésie, sont les points d’appel de la poésie de Michel Deguy.


   

Martin Rueff (dir.), Michel Deguy, l’allégresse pensive, Belin, coll. « L’extrême contemporain », 2007.

Jacques Darras · Décembre 2013

L’expression d’« allégresse pensive », que Michel Deguy puise dans l’œuvre du poète anglais John Milton, définit le poète tel qu’il devrait être, à la fois intellectuel et poète, réfléchissant la planète en allant et en pensant. La langue pour Deguy a du sens ou des sens, que le poète peut et doit fédérer, sans prétendre à l’unicité ni à la voyance, nous signifiant que l’intelligence n’est pas l’antagoniste de l’inspiration.


   

Michel Deguy, L’amitié avec Claude Lanzmann, La rumeur libre, 2019.

Louis Andrieu · Juillet-Août 2020

Ce livre émouvra tous ceux qui, comme Michel Deguy, se demandent «  qui protégera la Shoah et Shoah, maintenant que Claude Lanzmann est parti  ». Car il faut encore protéger l’histoire et sa représentation des récupérations touristiques, des négationnismes, voire de l’oubli du tragique, notion qui habite le recueil et le style de l’auteur, prompt à mélanger les grandes références à ses trouvailles linguistiques, dans un style aussi lyrique que sérieux.