
La Chine de Xi face à la Covid-19 : bottes de cuir et vieilles dentelles
La gestion chinoise de la crise sanitaire est au cœur d’un curieux paradoxe : incapable d’anticiper l’épidémie, à cause de la politisation de la santé publique et de la structure bureaucratique de l’État-Parti, le régime a su profiter de ces ressources pour la contenir par la suite, conférant une légitimité certaine à sa politique autoritaire.
Les analyses de la gestion chinoise de la Covid-19 ont été traversées en France par deux principaux écueils. Le prisme despotique concentre son attention sur la matrice politique autoritaire que révélerait la gestion du virus : en témoigneraient les dissimulations d’information du mois de janvier, la répression plus large des voix dissonantes ou les mobilisations massives de citoyens au nom d’une « guerre du peuple » qui n’est pas sans rappeler une rhétorique révolutionnaire plus ancienne. Le second prisme ferait de la gouvernance sanitaire chinoise un modèle à suivre et une source d’inspiration – légitimés par la quasi-disparition des cas depuis le mois d’avril et la normalisation progressive de l’activité économique et sociale encadrée par des protocoles sanitaires stricts, au moment même où d’autres régions du monde s’enfoncent aujourd’hui dans une seconde vague1.
Ces deux prismes souffrent chacun de leurs limites. Le premier, en ramenant uniquement la gestion chinoise de la Covid-19 à une dimension autoritaire, empêche de comprendre la potentielle spécificité des acteurs et ressources mobilisés lors de la gouvernance de crise de Xi Jinping dans le temps plus long de l’histoire politique, institutionnelle et sanitaire chinoise. Le second, sous-entendant la possibilité d’une transposition des modèles sanitaires, néglige quant à lui la