
Histoire des sensibilités sous la dir. d’Alain Corbin et Hervé Mazurel
Il s’agit […] de dessiner les contours d’un vaste programme de recherches visant à “penser ensemble la construction sociale du sensible et la construction sensible du social”.
L’objectif de cet ouvrage collectif est de « montrer, à travers quelques exemples historiques situés, tout que ce que ce savoir indiciaire sur les cultures sensibles et les régimes affectifs d’hier et d’aujourd’hui peut apporter à l’intelligence des sociétés ». Ce n’est en effet que par des indices que l’enquête historique, inspirée par le « vertige des foisonnements » qui caractérise l’histoire des sensibilités chère à Alain Corbin, peut déceler l’émergence, à une période donnée, d’une « sensibilité nouvelle ». Les exemples explorés sont l’usage des larmes dans l’Antiquité romaine, que Sarah Rey étudie comme « un fait sensible total » ; les émotions au Moyen Âge, que Damien Boquet analyse comme des « fossiles » ; le modèle météorologique, qu’Anouchka Vasak identifie comme un lieu commun de la littérature subjective entre Lumières et romantisme ; et l’écriture de l’intime, que Clémentine Vidal-Naquet lit dans les correspondances conjugales de la Grande Guerre en suivant l’hypothèse d’une « construction épistolaire des liens intimes ». Il s’agit donc bien de dessiner les contours d’un vaste programme de recherches visant à « penser ensemble la construction sociale du sensible et la construction sensible du social ». Dans un entretien, Alain Corbin précise que « le plaisir de l’histoire naît du dépaysement » et que l’historien n’a donc pas à « se faire juge d’instruction des êtres du passé ».