
Conspiration du réel de Grégory Rateau
À travers les vers de Grégory Rateau, comme en témoigne Catherine Dutigny dans la préface du recueil, il y a toujours « des raisons d’exister, de croire en une rédemption ».
Écrivain et poète, réalisateur et journaliste, l’écriture s’impose très tôt à Grégory Rateau comme un besoin vital. Après deux romans distingués et des publications dans de nombreuses revues de poésie, il signe un premier recueil profond, jubilatoire, érudit et porté par une voix singulière. À l’heure où « la poésie n’est plus l’institutrice de l’humanité » (Hölderlin), elle parvient toujours à se frayer un chemin. Et Grégory Rateau le prouve. Sa trajectoire personnelle, marquée par le voyage et l’exil, se perçoit dans ses poèmes. Loin de la posture désenchantée d’un Ulysse en quête d’un retour dans sa patrie, il jouit de la liberté que procure l’errance. Peut-être cette liberté s’inscrit-elle aussi dans une volonté d’échapper au réel. S’il y a une « conspiration du réel », c’est que ce dernier nous mène en bateau. Seule une voix poétique affranchie des codes, insoumise, pourrait vaincre cette tromperie. D’où le choix de privilégier les assonances, allitérations et rimes internes au schéma rimique traditionnel. Aussi le choix d’une voix presque élégiaque, faisant part de son lot de peines et de souffrances, toujours au bord du gouffre sans jamais y sombrer véritablement, s’inscrit-il en rupture avec les schémas traditionnels. À travers les vers de Grégory Rateau, comme en témoigne Catherine Dutigny dans la préface du recueil, il y a toujours « des raisons d’exister, de croire en une rédemption ». Dans la lignée baudelairienne, Grégory Rateau oppose en effet au réel et à sa conspiration une colère poétique subtile, lucide et élégante, en quête d’un nouveau rythme, en rupture avec les codes.