
La nouvelle science des données
L’idéologie qui accompagne le big data, faisant passer l’exigence théorique au second plan, met en péril l’avancée des connaissances et sapent les fondements d’une éthique rationnelle.
Comme tout paradigme scientifique ou technique nouveau, l’exploitation des mégadonnées – ou « big data » – se prête à des dérives idéologiques qui, si l’on n’y prenait garde, pourraient compromettre l’apport indiscutable de cette démarche à la connaissance et à l’action. C’est ainsi que la convergence des nanotechnologies, des biotechnologies, des technologies de l’information et des sciences cognitives (« NBIC convergence ») a pu donner naissance à l’idéologie transhumaniste, laquelle affirme la nécessité du passage le plus rapide possible au stade suivant de l’évolution biologique, dans lequel des machines conscientes nous remplaceront. L’idéologie qui accompagne le big data, quant à elle, annonce l’advenue de nouvelles pratiques scientifiques qui, faisant passer l’exigence théorique au second plan, mettent en péril l’avancée des connaissances et, plus grave encore, minent les fondements mêmes d’une éthique rationnelle.
Modélisation, causalité et corrélation
L’idée que le traitement de données pourrait devenir le fondement d’une science nouvelle, pourvu que les données soient suffisamment abondantes et riches et qu’il existe des algorithmes pour repérer des régularités, sous forme par exemple de corrélations, dans le fouillis inextricable qu’elles constituent, a fait lentement son chemin à mesure que progressaient le recueil d’informations en t