
LQI. Notre langue quotidienne informatisée de Yann Diener
L’essai du psychanalyste Yann Diener ausculte notre langue quotidienne imprégnée par le langage informatique, lui-même profondément marqué par la pensée religieuse. Il n’est plus question d’être pour ou contre le numérique, mais d’établir jusqu’à quel point il nous affecte, tant nos expressions les plus banales (« il est déconnecté de la société ») puisent au langage informatique. La société est envahie par le codage numérique, dont la paternité revient en partie au logicien Alan Turing, qui a concouru à déjouer les communications cryptées de la machine Enigma utilisée par l’Allemagne hitlérienne. La technocratie numérique qui conditionne notre existence trouve en effet ses racines dans la paranoïa nazie, analysée sur le plan linguistique par le philologue Victor Klemperer dans LTI, la langue du IIIe Reich (1947). Une langue mécanisée et déshumanisée conduit souvent à la déshumanisation des actes. Face au chiffrage de la société par Turing, Yann Diener recourt à Sigmund Freud, qui a permis de déchiffrer le langage de l’inconscient. Le langage humain sous pression informatique nous pousse-t-il au réflexe binaire et atrophie-t-il la réflexion ? La lecture de LQI, plus que jamais roborative, nous pousse à y réfléchir.